Sixième roulage à Lurcy-Lévis

Huit ans… Huit ans que je n’avais pas posé les roues à Lurcy-Lévis. Après avoir enchainé 5 journées entre octobre 2012 et novembre 2013 et signé un 1’14″40, je n’avais pas souhaité y retourner car je ne pensais pas pouvoir améliorer mon chrono sans évolution importante sur l’auto. Il était désormais temps d’aller remettre le chrono en jeu mais la météo en aura décidé autrement…

Alors que je souhaitais reprendre les trackdays un peu plus sérieusement cette année, je me suis heurté à la pluie à Magny-Cours fin mai et à nouveau à la pluie à Lurcy-Lévis le 14 juillet… Il faudra donc reprendre rendez-vous dans les prochains mois en espérant avoir plus de chance

Conditions météorologiques

La pluie du matin n’a pas permis à la piste de sécher. L’après-midi, je dois plutôt parler d’une piste humide et non détrempée mais quoi qu’il en soit, il était impossible de réaliser un chrono intéressant et comparable à ce qu’il est possible de faire sur le sec.

Température - Lurcy-Lévis - 14/07/2021

Configuration de l’auto

Par rapport à mon cinquième roulage à Lurcy-Lévis, l’auto a sensiblement évolué à plusieurs niveaux :

Châssis : grosse barre anti-roulis et biellettes réglables, hauteur de crémaillère ajustée, jantes TMR et goujons light, Yokohama A052 et disques sur bol alu. Uniquement sur les masses en rotation, le gain de poids est de 16,3 kg. La barre anti-roulis et les biellettes alourdissent l’auto de 1,3 kg.

Moteur : poulies de vilebrequin et d’alternateur allégées, volant moteur allégé et embrayage renforcé. Le gain est de 4,7 kg. En revanche, je roulais avec le catalyseur et le silencieux Lotus Sport à la place de mon Quicksilver en titane. Cela grève le poids de 8,5 kg et se situe le plus à l’arrière de la voiture.

Gain de poids et pièces en carbone : réservoir en alu, vitre arrière en lexan, rétroviseur intérieur light, écopes latérales, panneaux d’accès avant, panneaux de porte, seuils de porte et entourage de colonne de direction en carbone. Le tout offre une économie de 8,7 kg.

On arrive donc à -19,9 kg par rapport à mon précédent roulage, une géométrie nettement mieux travaillée grâce au SBMT et des A052 réputés meilleurs que les R888. Pour le reste, la configuration de l’auto était équivalente : un seul siège carbone et la capote. Je n’avais donc aucune excuse technique pour ne pas améliorer le chrono !

Télémétrie

Rien de nouveau de ce côté là, j’ai utilisé mon couple habituel Vbox Sport 20 hz (plus fiable que les GPS 10 hz que l’on trouve pour bien moins cher) avec antenne externe et OBDLink LX pour récupérer les données du calculateur. Les données transitent par Bluetooth vers mon Samsung Galaxy S8 équipé de l’excellent RaceChrono Pro en version 7.2.8.

Temps au tour

Sur piste vraiment humide avec la pluie qui tombait, j’ai réalisé un 1’46″21. Sans avoir 5 secondes à gagner, je pense que tourner dans les 1’44 en réduisant un peu la marge de sécurité sur les freinages aurait été possible. L’écart avec une piste sèche est énorme, de l’ordre de +/- 30 secondes (+40%). Sur ma dernière session de la journée avec une piste humide mais pas détrempée et quelques petites gouttes de pluie sans pouvoir parler d’une averse, j’ai réussi à tourner en 1’33″59 (+/- 20 secondes, +26%). Cela permet de se rendre compte de l’impact plus que conséquent des conditions de piste sur le chrono.

Tracé - Lurcy-Lévis - 14/07/2021

Je n’avais pourtant pas l’impression d’être au ralenti et les limites d’adhérence étaient très proches à peu près partout, quand elles n’étaient pas franchies et rattrapées par des contre-braquages. Perdre 20 secondes par rapport à un temps sec me paraissait énorme et seule la télémétrie est en mesure d’éclaircir le sujet. Les solutions intégrées permettent rapidement de visualiser les données et RaceChrono fait cela avec brio mais comme j’aime jouer avec les données, rendre les chiffres parlant et avoir le maximum de souplesse dans les formats de restitution, je préfère passer par un export CSV puis travailler avec Excel. Le graphique ci-dessous présente la vitesse sur un tour sec (orange) et humide (bleu). Elle se lit sur l’axe primaire des ordonnées, à gauche. La ligne en pointillé gris représente l’écart de vitesse et se lit sur l’axe secondaire des ordonnées, à droite.

Tour humide vs. sec - Vitesse (km/h) - Lurcy-Lévis - 14/07/2021

Le point de départ se situe dans la petite portion droite juste avant l’entrée des stands. Déjà ici, l’écart de vitesse est impressionnant : 100 km/h contre 127 par temps sec (-27 km/h).

Dans le premier léger droite (avant le point 1), l’écart s’accentue avec 94 km/h contre 125 (-29 km/h). Je mets les roues droites et vise le cône situé à l’extérieur de la piste, entre les points 1 et 2. C’est un passage que j’aime beaucoup sur cette piste et sur le sec je pense que c’est un de ceux ou j’ai le moins à gagner avec 139 km/h avant le freinage (point 1). Sur le mouillé, je me contente de 106 (-33 km/h). C’est aussi un endroit ou je suis déjà sorti et autant sur le sec on peut espérer s’arrêter pas trop loin dans l’herbe, autant sous la pluie c’est direction le marécage et embourbement assuré… Le long gauche menant au point 2 est négocié entre 25 et 35 km/h moins vite.

Avant d’arriver à l’épingle (point 2), la différence de freinage est flagrante : j’appuie sur la pédale quasi au même endroit sauf que j’arrive à 122 km/h sur le sec contre 88 sur le mouillé (-34 km/h) et que je me retrouve à 50 km/h sur le sec contre 47 sur le mouillé. Il me faut donc la même distance pour perdre 72 km/h sur le sec que 41 sur le mouillé ! Je ne peux réaccélérer que plus tard en sortie d’épingle et je dois couper plus tôt pour négocier le gauche qui suit 15 km/h moins vite que sur le sec.

Alors que je négociais le droite (point 3) en soulageant les gaz et en cassant ma vitesse de seulement 3 km/h sur le sec, sur le mouillé je dois prendre les freins. Vitesse au point le plus lent : 84 km/h contre 108 (-24 km/h). En sortie du point 3, on voit que l’auto marche bien, la courbe montant plus à la verticale. J’atteins 109 contre 125 (-16 km/h).

A l’endroit le plus lent de la chicane (point 4), j’ai ralenti à 78 km/h contre 104 (-26 km/h). S’en suit tout l’escargot entre 10 et 20 km/h moins vite sur piste humide.

En début de ligne droite (point 5), je sors à 93 km/h contre 113 (-20 km/h). La ligne droite montre à nouveau une belle santé de mon auto 8 ans plus tard. Elle a certes moins de poids à emmener (-19,9 kg) mais elle était un plus contrainte au niveau de l’échappement (catalyseur + silencieux plus gros).

Au point le plus rapide (point 6), j’arrive à 173 km/h contre 178 (-5 km/h), ce qui montre bien que j’accélère un peu plus fort qu’avant puisque je diminue l’écart. Bien entendu sur le sec, je coupe beaucoup plus tard ce qui me permet de continuer d’accélérer jusqu’à 184 km/h. Le freinage en bout de ligne droite est intéressant. Sur le sec, on voit que le coup de pied sur la pédale de frein est violent et qu’il permet de casser net la vitesse jusqu’à 155 km/h. Sur le mouillé, on voit que je casse beaucoup trop ma vitesse avec 94 km/h (-61 km/h) mais l’explication est claire sur la vidéo en fin d’article : mon père, au volant de la 208 GTI by Peugeot Sport, me laisse passer et est à l’extérieur. Évidement, je n’ai pas envie d’en faire trop, de partir en survirage et de venir m’appuyer contre lui…

Le double-droit du bout de la ligne droite se négocie en deux temps avec un coup de frein (point 7) qui s’opère à 164 km/h sur le sec (je me fais presque peur en écrivant cette vitesse et en pensant aux conséquence d’une sortie de piste sans arceau à cet endroit…) contre 115 sur le mouillé (-49 km/h). L’écart est d’une trentaine de km/h tout le long du deuxième rayon de cette courbe pour arriver au point de freinage avant la ligne d’arrivée (point 8) à 118 contre 149 (-31 km/h).

Tour humide vs. sec - Ecart temps au tour (s) - Lurcy-Lévis - 14/07/2021

On le voit bien sur la courbe ci-dessus, les 20 secondes sont perdues tout le long du circuit de manière assez linéaire. On constate que plus les virages sont rapides, plus l’écart de vitesse est important entre une piste humide et une piste sèche (entre les points 6 et 8, la courbe repasse au-delà de la droite de tendance). En revanche sur les phases d’accélération, l’écart augmente moins vite (au niveau du point 2 et entre les points 5 et 6). Je sais qu’il était possible de gagner 1 ou 2 secondes sur l’entrée du droit en bout de ligne droite, de retarder certains freinages et de passer un peu plus fort sur la portion entre les points 1 et 2 mais je pense qu’il était compliqué de faire beaucoup mieux car j’étais sur le fil dans l’escargot, entre les points 7 et 8 et qu’en cherchant à retarder un peu le freinage en bout de ligne droite, j’ai bloqué les roues à quelques reprises. Ma vitesse moyenne sur piste humide est de 98,2 km/h contre 123,5 sur piste sèche (-25,3 km/h).

Tour humide vs. sec - Accélération longitudinale (G) - Lurcy-Lévis - 14/07/2021

Je n’ai pas l’habitude d’analyser les accélérations longitudinales ou latérales mais pour une fois, je fais une exception. Elles sont enregistrées par le biais du Vbox Sport pour la session pluie de 2021 et par mon ancien boitier Qstarz (sans doute un peu moins précis) pour la session sèche de 2013. En positif, ce sont les accélérations et en négatif les freinages. Le maximum est atteint après l’épingle (point 2) sur le sec (+0,42G) comme le mouillé (+0,35G), traduisant un léger problème de motricité en sortie de ce virage serré, sur le second rapport. Les autres accélérations sont toutes équivalentes et montrent bien que la puissance passe au sol lorsque les roues sont droites. Faut-il en conclure qu’il me faut plus de chevaux et qu’il est temps de m’attaquer à la préparation du moteur ?

En revanche sur les freinages, la différence est beaucoup plus marquée puisque sur l’humide je prends -0,68G en bout de ligne droite (valeur max sur le tour) contre -0,93G sur le sec (pour un max à -0,96G juste avant l’épingle). En regardant dans le reste de mes données télémétriques, j’ai constaté que j’atteignais -0,74G sur les freinages ou je bloquais les roues en bout de ligne droite. Le -0,68 n’est donc pas loin de l’optimal réalisable sur ce tour. En revanche, la courbe confirme ma sensation d’avoir la capacité de gagner du temps en retardant certains autres freinages, notamment avant l’épingle. Bien entendu, il faut tenir compte de l’angle du volant (que je n’ai pas dans mon jeu de données) ou des transferts de masse latéraux qui déstabilisent l’auto et expliquent que tous les freinages ne puissent pas être au même niveau sur un tour.

Ci-dessous, c’est la même chose pour le latéral. Sur le sec, je suis entre +1,28G (virages à gauche) et -1,25G (virages à droite) et on voit clairement que je viens taper ces bornes dans tous les virages ce qui montre que je suis à la limite partout (la vidéo de mon meilleur tour sec est disponible dans cet article et à voir les contre-braquages dans le double droit, il n’y a pas de doute : je suis bien à la limite !). Sur le mouillé, les bornes se resserrent sur une plage comprise entre +0,84G et -0,91G. A nouveau on voit que je les atteins presque partout sauf sur les deux sections sur lesquelles je ressentais à chaud pouvoir passer plus vite : le début de circuit entre les points 1 et 2 et sur l’entrée du droit en bout de ligne droite. La bonne nouvelle, c’est que la télémétrie confirme bien le ressenti du pilote : ouf, je ne suis pas trop rouillé !

Tour humide vs. sec - Accélération latérale (G) - Lurcy-Lévis - 14/07/2021

Dernier point que je souhaitais confirmer, la charge moteur. En 2013, je ne loggais pas les données du calculateur donc je ne peux pas faire de comparaison mais on constate que sur la pluie, je passe 33% de mon temps entre 0 et 3850 tr/m, 47% entre 3850 et 4900 tr/m, 14% entre 4900 et 5950 tr/m et seulement 5% au-delà de 5950 tr/m. A titre de comparaison sur un tour sec à Magny-Cours Club, ces pourcentages sont respectivement de 1, 40, 35 et 24%. On voit que la sollicitation mécanique est bien moindre et cela se traduit dans ma consommation moyenne : +/- 12 l/100 km sur la journée pluvieuse à Lurcy-Lévis contre 20 l/100 km sur un trackday sec habituel (ce qui reste plus que raisonnable en comparaison à l’immense majorité des autres autos sportives…).

Tour humide vs. sec - Régime moteur (tr/m) - Lurcy-Lévis - 14/07/2021

Pour une fois, je vous partage une vidéo un peu plus longue qu’uniquement celle de mon meilleur tour. L’intérêt est d’y voir une bagarre avec une Porsche 991.2 GT3 RS… Mon meilleur tour débute à 8’30.

Organisation et plateau

Merci à Motorsport Magazine pour l’organisation de cette journée : discussions intéressantes, bonne humeur, fair-play en piste… Rien à redire. Et comme d’habitude dans les paddocks, l’ambiance au sein du groupe des Lotus / Caterham était plus qu’appréciable. Au plaisir de vous recroiser Denis (Elise Sports Racer), Arthur (Elise S Club Racer), Jean-François (Seven 275R), Arnaud (Cup 250), Guillaume, etc…

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